Jugeant que l’offre du gouvernement du Québec représente un recul inacceptable de leurs conditions de travail, les employé·es du secteur public se préparent à entrer en grève cet automne. S’il se concrétise, ce débrayage serait de loin le plus important de l’histoire du Québec.
Les représentant·es du Front commun des syndicats du secteur public québécois ont annoncé à Montréal mercredi qu’ils en sont à préparer une stratégie nationale de grève, en réaction à l’impasse des négociations pour le renouvellement des conventions collectives de leurs membres.
Le Front commun rassemble 420 000 travailleur·euses de la Centrale des syndicats nationaux (CSN), de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) et de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS).
Cette alliance historique survient une cinquantaine d’années après le premier Front commun de 1972, qui avait lui-même mené la plus grande grève générale illimitée de l’histoire du Québec. À l’époque, 210 000 travailleur·euses du secteur public avaient débrayé, soit environ la moitié du nombre de syndiqué·es représenté·es par l’actuel Front commun.
« On se prépare à la grève cet automne, mais ce n’est pas le but recherché. Le but recherché est vraiment d’obtenir une entente négociée satisfaisante pour nos membres. C’est sur ça qu’on se concentre dans les prochaines semaines et les prochains mois », explique Robert Comeau, président de l’APTS.
Toutefois, devant ce qu’ils estiment être l’arrogance et le manque d’écoute du gouvernement envers les travailleur·euses du secteur public, les syndiqué·es doivent continuer à se mobiliser, augmenter la pression et être prêt·es à aller jusqu’à la grève, précise Éric Gingras, président de la CSQ.
S’il se concrétise, ce débrayage serait de loin le plus important de l’histoire du Québec.
« Nous irons consulter nos membres et ce sont eux qui décideront. Ce ne sont pas les syndicats qui font la grève, ce sont les travailleur·euses qui décident d’aller jusque-là, parce que les conditions qui sont devant eux sont inacceptables, parce qu’on n’est pas capable d’attirer du monde et parce qu’on n’est pas capable de garder notre monde », ajoute-t-il.
Les syndicats du Front commun ont tous déjà reçu de leurs membres le mandat de planifier une possible grève et les démarches en ce sens sont entamées.
Des négociations au point mort
Depuis le début des négociations en décembre dernier, le gouvernement reste campé sur ses positions, et ce, après seize rencontres de négociations, explique François Enault, premier vice-président de la CSN.
Le Front commun a déjà entamé un processus de médiation avec le gouvernement, mais sans grand succès, regrette Magali Picard, présidente de la FTQ.
« Ce qu’on demande pour la première année c’est 100 $ de plus par semaine. »
François Enault, CSN
« Le gouvernement maintient sa position d’une augmentation des salaires de 9 % sur cinq ans. On nous dit qu’il n’y a pas de problèmes avec ça quand leurs propres prévisions pour l’inflation sont de 16,6 % sur cinq ans », remarque François Enault. Selon lui, ce que le gouvernement demande aux travailleur·euses de la santé et des services sociaux, c’est de s’appauvrir de plus en plus, surtout que la contre-offre du gouvernement contient aussi un recul sur les acquis au niveau des régimes de retraite.
« Ce qu’on demande pour la première année c’est 100 $ de plus par semaine. Ils nous disent qu’on demande trop, alors que les députés viennent de se voter pour eux-mêmes une augmentation de 482 $ de plus que ce qu’on demande. C’est un peu indécent », remarque François Enault.
La qualité des services en jeu
L’enjeu du salaire et des conditions de travail va bien au-delà de l’appauvrissement des travailleur·euses, car c’est la santé des réseaux publics qui serait en jeu, selon Éric Girard. Il rappelle que les syndiqué·es disent être de plus en plus épuisé·es, notamment parce que le secteur public n’offre tout simplement plus des salaires suffisamment attrayants pour combler les besoins de personnel.
Les syndiqué·es disent être de plus en plus épuisé·es.
« Je ne peux pas croire que l’employeur qu’est le gouvernement du Québec est pour abandonner ses travailleur·euses, après tout ce qu’ils et elles ont fait et font encore après une pandémie qui leur a demandé des efforts surhumains », dénonce Magali Picard.
Manifestation le 23 septembre
Le Front commun prépare aussi une grande manifestation à Montréal le 23 septembre prochain pour envoyer un message clair au gouvernement sur la force de leurs intentions et de leur mobilisation, explique Robert Comeau.
« Tous ceux et celles qui tiennent à avoir des services publics de qualité et à garder nos réseaux forts sont invités à se joindre à nous », précise-t-il.