« Les planètes sont alignées : est-ce qu’on veut garder un système de santé et de services sociaux public et accessible pour tout le monde? » C’est la question que lance Robert Comeau, le président de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS).
Le Front commun composé de la CSN, de la CSQ, de la FTQ et de l’APTS a rejeté mercredi dernier les offres patronales du Conseil du trésor pour le renouvellement des conventions collectives du secteur public. Ces offres avaient été déposées en décembre.
Ces quatre syndicats, qui représentent 420 000 travailleur·euses de l’État québécois, vont jusqu’à qualifier d’insultantes les offres patronales.
Dans le contexte inflationniste, l’augmentation salariale de 9 % sur cinq ans que propose le gouvernement est insuffisante, d’après le Front commun. Leurs membres ont déjà, en moyenne, un retard de salaire de 11,9 % comparé au reste de la population.
En plus de réclamer une augmentation de salaire de 9 % sur trois ans plutôt que cinq (2 % en 2023, 3 % en 2024 et 4 % en 2025) qui rattraperait en partie l’écart avec les travailleurs et travailleuse au privé, le Front commun propose d’indexer les salaires au public sur l’Indice des prix à la consommation.
Au front contre l’effritement des services publics
Julia Posca, chercheuse à l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), explique que dans certains domaines du secteur public, « notamment en santé et en enseignement », on observe un cercle vicieux : un manque de personnel va mener à de moins bonnes conditions de travail, qui feront fuir les employé·es, et ainsi de suite.
« Des charges de travail plus lourdes ou des horaires atypiques, par exemple, » mènent à une mauvaise rétention de personnel, ce qui renforce le problème initial.
Robert Comeau, de l’APTS, soutient que le Front commun veut renverser cette tendance : au-delà des salaires, son mouvement lutte pour préserver le modèle social québécois. Porté par la vision d’un système public capable d’offrir des services sociaux, une éducation et des soins de santé de qualité, le Front commun veut colmater les brèches par où s’écoulent les employé·es qui font ce travail essentiel.
Pour ce faire, il est crucial d’améliorer les conditions de travail, insiste-t-il.
Des conditions favorables pour faire des gains
Si les négociations ne sont pas fructueuses, les syndicats sont « absolument » prêts pour la grève, prévient M. Comeau. Même s’il précise que la grève n’est pas l’objectif des négociations, M. Comeau soutient « qu’on va se battre jusqu’au bout pour nos membres ».
« On est capable de gagner, on va faire virer de bord les orientations du gouvernement. »
Robert Comeau
« Les travailleurs et les travailleuses sont en bonne posture pour revendiquer des hausses de salaire, ou au moins des améliorations de leurs conditions de travail », analyse Julia Posca. En effet, le manque de main-d’œuvre pourrait aider les employé·es du public à faire des gains.
Elle rappelle « le cas des éducatrices en service de garde, qui ont réussi à avoir des hausses salariales » après avoir débrayé, en 2021.
Le président de l’APTS est optimiste. « On est capable de gagner, on va faire virer de bord les orientations du gouvernement! »
Du PLQ à la CAQ : « On appauvrit le système public »
Christian Dubé, le ministre de la Santé et des Services sociaux n’inspire aucun espoir chez Robert Comeau, qui le considère au mieux comme l’équivalent « moins garroché » de l’ex-ministre libéral de la Santé Gaétan Barrette.
« On voit essentiellement les mêmes directions. »
Quelles sont ces directions, d’après le président de l’APTS? « On appauvrit le système public pour démontrer à la population que ça ne fonctionne pas et que le privé est la solution à ça. » D’après lui cette logique est « un échec, une manière d’engraisser le salaire de quelques entreprises privées sur le côté. Nos gens voient tout ça! »
Pour le syndicaliste, les libéraux et les caquistes, dans la mouvance néolibérale, ne semblent pas avoir une vision à long terme du réseau de santé et de service sociaux.