
Article de l'Initiative de journalisme local
« Les femmes de notre communauté sont en danger »
Un rassemblement à Montréal a rendu hommage aux femmes autochtones assassinées au Manitoba.
Le Foyer des femmes autochtones de Montréal a organisé un rassemblement en solidarité avec la communauté autochtone de Winnipeg, après les meurtres là-bas de quatre femmes des Premières Nations.C’était aussi l’occasion de rappeler la surreprésentation des femmes autochtones, notamment adolescentes, parmi les personnes assassinées et disparues au Québec.
Une trentaine de participant·es se sont réuni·es samedi en début d’après-midi au square Cabot, bravant la tempête pour rendre hommage aux quatre femmes autochtones assassinées au Manitoba.
En mai dernier, le corps sans vie de Rebecca Contois, une jeune de la Première Nation O-Chi-Chak-Ko-Sipi, avait été retrouvé dans une décharge à déchets à Winnipeg.
Le principal suspect, Jeremy Skibicki, est aussi accusé des meurtres au premier degré de trois autres femmes autochtones : Marcedes Myran, 26 ans, Morgan Beatrice Harris, 39 ans, et une jeune femme dont l’identité n’a pu être confirmée, mais que la communauté a baptisé Buffalo Woman.
Leurs dépouilles n’ont toujours pas été retrouvées, mais la police de Winnipeg croit qu’elles se trouveraient dans une autre décharge de la ville. Les autorités estiment cependant qu’une fouille est impossible en raison de la superficie et de la quantité de déchets à examiner.
Une importante mobilisation, menée par les proches des victimes, est en cours au Manitoba afin de bloquer l’accès à la décharge et de dénoncer l’inaction de la police au parlement à Ottawa.
« Nous nous tenons présentement au square Cabot, où nous avons une importante population en itinérance : ce sont les femmes d’ici qui risquent d’être les prochaines victimes. »
Nakuset, directrice générale du Foyer des femmes autochtones de Montréal

« La réalité, c’est que les femmes de notre communauté sont en danger », lance Nakuset, directrice générale du Foyer pour femmes autochtones de Montréal. « C’est très important que vous soyez là », dit-elle en s’adressant au petit groupe rassemblé sous les flocons. « Ça montre aux gens de Winnipeg que Montréal se soucie de ce qui se passe. »
« Ces femmes qui ont été tuées à Winnipeg étaient en situation d’itinérance », souligne Nakuset. « Nous nous tenons présentement au square Cabot, où nous avons une importante population en itinérance : ce sont les femmes d’ici qui risquent d’être les prochaines victimes. »
Un enjeu systémique
Lors de son discours, Nakuset a rappelé que les corps de police ont tendance à minimiser la gravité des disparitions de femmes autochtones, présumant que celles-ci sont en fugue et réapparaîtront éventuellement.
Cela cause des retards importants dans les enquêtes et diminue sérieusement les chances de retrouver les disparues.

« [La communauté autochtone de Montréal] a signé un accord avec le SPVM en 2015 pour assurer de meilleures relations de travail avec la police. Mais c’est très difficile », explique Nakuset. « Les peuples autochtones ont une histoire complexe avec la police, et il n’y a pas eu de réparation. »
Lancé par le Foyer des femmes autochtones de Montréal, le projet Iskweu tente de répondre au problème en faisant le pont entre les proches des victimes et la police. Il recense aussi les cas de meurtres et de disparitions de femmes autochtones au Québec.
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Des cas non résolus au Québec
Après quelques allocutions, Tanisha Gallichon, coordinatrice du projet Iskweu s’est adressée au groupe afin de présenter le cas de Donna Paré, une femme autochtone âgée de 32 ans au moment de sa disparition à Montréal en 2019.
« Son cas n’est pas résolu, le SPVM est au courant, mais nous avons très peu de nouvelles », explique-t-elle. « C’est important pour nous de mentionner son nom. Elle a une famille très aimante qui est en communication constante avec nous et tout le monde veut la retrouver. »
Parmi les cas non résolus au Québec, il y a aussi ceux de Maisy Odjick et Shannon Alexander, âgées de 16 et 17 ans, qui avaient disparu mystérieusement en septembre 2008 à Maniwaki. 14 ans plus tard, elles manquent toujours à l’appel.
Plus récemment, un avis de recherche a aussi été lancé pour Linda Uqaituk Kirshner, une jeune de 14 ans qui a été vue pour la dernière fois le 3 décembre dernier à Kirkland.
Toute personne ayant des informations est priée de communiquer avec Iskweu, le Service de police de la ville de Montréal ou la Sûreté du Québec.