Pour comprendre la culture québécoise contemporaine, il faut absolument tenir compte des fractures qui traversent la société, croit Sarah-Louise Pelletier-Morin, doctorante en études littéraires à l’UQAM. Avec l’ouvrage Mythologies québécoises, elle a invité 35 auteur.e.s à écrire sur les nouveaux symboles de l’imaginaire québécois et sur les débats qu’ils suscitent.
Quand on veut définir l’identité québécoise, « on revient toujours aux mêmes clichés », regrette Sarah-Louise Pelletier-Morin : l’hiver, le hockey, le sirop d’érable… Mais, à ses yeux, la culture du Québec actuel est beaucoup plus riche et plus complexe. Tout le monde n’adhère pas aux mêmes valeurs et cela provoque d’ailleurs des conflits, constate-t-elle.
On ne peut plus parler de la société québécoise sans la prendre par ses tensions, ses divisions.
Sarah-Louise Pelletier-Morin
Pour « prendre le pouls d’un certain choc entre les idées » dans le Québec actuel, elle a invité plusieurs auteur.es à analyser les « mythes » qui peuplent notre imaginaire. Les mythes, ce sont toutes ces choses du quotidien qui n’ont l’air de rien, mais qui constituent ensemble la culture québécoise, explique Sarah-Louise Pelletier-Morin. Elle évoque ainsi les cônes orange, l’habillement de Catherine Dorion ou encore le stade olympique. Tous ces symboles ont été au centre de vives discussions dans les dernières années : ils en disent long sur nos tiraillements, juge l’auteure.
Pour Sarah-Louise Pelletier-Morin, les grandes divisions qui définissent aujourd’hui la société québécoise sont celles qui existent entre les générations, entre les villes et les régions, et surtout entre les croyances conservatrices et progressistes. À ses yeux, la question la plus importante est sans doute de savoir si le Québec doit se replier sur lui-même, ou alors devenir une véritable société d’accueil, ouverte à tout le monde.
Le Québec actuel est tiraillé entre ses villes et ses régions, écartelé entre son passé catholique et ses mouvements progressistes, sa survie et son ouverture à l’autre.
Sarah-Louise Pelletier-Morin, dans son introduction aux Mythologies québécoises
Avec son nouveau livre, Sarah-Louise Pelletier-Morin a un objectif très simple : « faire naître des débats, encore ».
Mythologies québécoises
Collectif dirigé par Sarah-Louise Pelletier-Morin, Montréal, Nota Bene, 2021, 222 p.
Le livre réunit de courtes contributions par 35 personnes d’horizons très divers. Chacune décrypte un élément de l’imaginaire québécois contemporain et révèle « les valeurs, les peurs ou les idées » qui se cachent derrière un symbole faisant partie de nos vies quotidiennes : Tim Hortons, Véro, Elvis Gratton, les publicités pour le lait ou pour la retraite à 55 ans, etc. Ces « mythes » sont en apparence anodins, mais ils sont pourtant révélateurs de notre « inconscient collectif » parce qu’ils sont partout et agissent sur nous sans qu’on s’en rende toujours compte, explique Sarah-Louise Pelletier-Morin.
L’objectif de l’ouvrage est de comprendre à quoi ressemble la culture dominante au Québec, mais aussi de voir apparaître les nouveaux symboles qui émergent et qui renouvellent, transforment ou contestent la culture traditionnelle.