Des employeurs ont profité des consultations prébudgétaires pour faire part au gouvernement du Québec de leurs demandes et préoccupations pour 2024. Ils réclament ainsi plus d’aide pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre et à la transition écologique, tout en réclamant une réduction de leur contribution aux finances de l’État.
Les différents regroupements d’entreprises et de chambres de commerce de la province ont rencontré conjointement le ministre des Finances du Québec pour faire part de leurs attentes par rapport au prochain budget de la province qui sera déposé le 21 mars prochain. Dans un mémoire déposé par le Conseil du patronat du Québec (CPQ) dans le cadre de la rencontre, on réclame à l’État d’investir substantiellement pour soutenir la compétitivité des entreprises.
Toutefois, le CPQ prévient le gouvernement de ne pas aller puiser dans leurs coffres pour soutenir ces investissements, et va jusqu’à demander de réduire en partie leurs contributions, notamment en matière de taxes foncières et de celles associées au transfert des entreprises. « C’est certain que les entreprises veulent toujours baisser leur fardeau fiscal », remarque le président de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), Éric Gingras. « Mais en baissant les entrées d’argent, ça veut nécessairement dire qu’on coupe dans les services ».
« C’est certain que les entreprises veulent toujours baisser leur fardeau fiscal. Mais en baissant les entrées d’argent, ça veut nécessairement dire qu’on coupe dans les services ».
Éric Gingras, président de la Centrale des syndicats du Québec
Une transition aux frais de Québec
Le Conseil souhaite également que le gouvernement assume une grande partie des coûts nécessaires à la décarbonation de leurs activités. « On embarque complètement dans la réduction des gaz à effets de serre, mais ça ne rapporte pas de réduire. Si on veut continuer à prospérer tout en réduisant, il faut qu’on nous supporte », soutient Norma Kozhaya, vice-présidente à la recherche au Conseil du patronat du Québec.
Une proposition qui est partiellement partagée par les centrales syndicales de la province qui ont également déposé un mémoire en prévision du budget. « On ne peut pas faire ça n’importe comment, il faut que la transition énergétique se fasse avec un réel plan vert issu d’une consultation publique », explique Éric Gingras.
Pour lui, le gouvernement doit s’assurer que les employeurs continuent à faire leur part pour s’assurer que les changements technologiques reliés à la transition ne laissent personne derrière, notamment par rapport à la formation des travailleur·euses. Il conseille de ne pas concentrer les formations sur des objectifs à court terme, car cette approche limite ensuite la capacité des travailleur·euses à changer d’emploi. Par exemple, on peut renforcer des compétences générales comme la littératie plutôt que de se concentrer sur l’utilisation d’une technologie particulière. « Il faut jouer sur l’ensemble du citoyen, pas juste sur les compétences au travail dans une tâche donnée », souligne-t-il.
Pallier le manque de travailleur·euses
Les entreprises demandent aussi au ministre de les aider à agrandir le bassin de main-d’œuvre d’une part grâce à l’apport migratoire et, d’autre part, en facilitant le maintien au travail des travailleurs de plus de 60 ans. « Le gouvernement doit nous aider avec des mesures fiscales pour que ce soit intéressant de continuer à travailler. Ces travailleurs ont de l’expérience et connaissent le milieu de travail, il faut les attirer à rester », observe Norma Kozhaya.
Elle concède toutefois que les employeurs ont un bout de chemin à faire pour donner des conditions favorables au maintien à l’emploi des travailleur·euses expérimenté·es, notamment en leur donnant plus de flexibilité.
« Le gouvernement doit nous aider avec des mesures fiscales pour que ce soit intéressant de continuer à travailler. Ces travailleurs ont de l’expérience et connaissent le milieu de travail, il faut les attirer à rester »
Norma Kozhaya, vice-présidente à la recherche au Conseil du patronat du Québec
Éric Gingras rappelle toutefois que le diable est dans les détails et qu’il faut faire bien attention de ne pas créer une situation où les travailleur·euses seraient contraint de travailler plus ou de repousser leur retraite au nom de la productivité.
Réinvestir l’impôt des particuliers et des entreprises dans les services publics, notamment dans les Centre de la petite enfance (CPE) et les services de garde, pourrait avoir un impact beaucoup plus important sur la main-d’œuvre disponible, selon le président de la CSQ. « Investir dans les services publics c’est aussi investir dans la productivité », conclut-il.