En début de soirée le jour de la Saint-Valentin, près de 200 personnes ont marché sur la rue Sainte-Catherine dans le centre-ville de Montréal en soutien aux femmes autochtones disparues et assassinées. L’événement, organisé par le Refuge des femmes autochtones et son projet de recherche Iskweu, était l’occasion de souligner ce fléau qui continue de sévir partout au pays.
Près de 200 personnes se sont mobilisées mardi pour dénoncer l’inaction des autorités sur cet enjeu au Canada. Ce rassemblement est depuis plusieurs années une tradition le jour de la Saint-Valentin.
« On est en 2023 et on n’est toujours pas plus avancé parce qu’ils ne traitent que les symptômes, mais pas les causes profondes de ce problème. », a déploré l’activiste mohawk, Ellen Gabriel devant la foule rassemblée au square Cabot en début de soirée.
« Les femmes autochtones sont marginalisées, parce que vous n’enseignez pas dans vos programmes scolaires les problèmes qui ont provoqué un génocide dans ce pays. »
Chandelles, bannières et tambours en main, ils et elles ont par la suite déambulé sur la rue Sainte-Catherine. Le cortège a finalement terminé son parcours au square Phillips dans le centre-ville où d’autres discours se sont déroulés ainsi que des chants traditionnels.
Iskweu, le projet de recherche du Foyer des femmes autochtones et l’organisme derrière le rassemblement, recense actuellement près de 200 femmes et filles autochtones disparues et assassinées au Québec. C’est plus de quatre le nombre estimé par la GRC.
« Juste pour vous donner une idée, je pense que nous sommes à peu près 200 personnes ici. Imaginez si nous étions tous assassinés ici, ce soir, juste parce que vous êtes autochtones », a souligné Nicole Janis Qavavau-Bibeau, coordinatrice de recherche d’Iskweu lors de son discours.
La jeune femme déplore que malgré le rigoureux travail d’enquête qu’a mené Iskweu jusqu’à présent, l’organisme n’a toujours pas été interpellé afin de collaborer avec les autorités.
Sans nouvelles depuis 14 ans
Parmi les cas qui demeurent non-résolus au Québec, on note ceux de Maisy Odjick et Shannon Alexander, âgées de 16 et 17 ans, qui avaient disparu mystérieusement en septembre 2008 à Maniwaki. Quatorze ans plus tard, elles manquent toujours à l’appel et leurs familles demeurent sans réponse.
« Quand les familles sont allées voir la police, elles n’ont pas été prises au sérieux », raconte Nicole Janis Qavavau-Bibeau. Dans son rôle de coordinatrice de recherche, elle recense et documente les cas de femmes et de filles autochtones disparues et assassinées au Québec. « La police se dit, “ah ce sont des ados, elles sont sur le party, elles vont revenir.” »
Dans les cas de Maisy et Shannon, un meilleur temps de réaction de la police aurait peut-être pu changer la donne. « Quand il y a une disparition, les premières 48 heures sont essentielles. Plus le temps avance, moins on a de chances de les retrouver. »
« C’est un peu un non-dit, mais je pense que la police sait qu’elle a mess up the case [NDLR : raté son coup] », critique-t-elle. « Ce n’est plus leur priorité, et ça ne l’a jamais été. »
La jeune femme souligne aussi le manque d’attention médiatique accordé aux cas de Maisy et Shannon, qui sont passé inaperçu comparé par exemple à celui de Cédrika Provencher, une fillette de 9 ans dont la disparition en 2007 avait fait une onde de choc dans les médias, et ce même après la découverte de sa dépouille en 2015.
« On en parlait et on avait toujours l’espoir de la retrouver vivante », souligne-t-elle. « Quand on ne donne pas [ce même espoir] aux femmes autochtones, ça tombe dans les oubliettes. »
Toute personne ayant des informations concernant Maisy et Shannon est priée de communiquer avec Iskweu, ou la Sûreté du Québec.