Devoir de toutes les mémoires, l’Holocauste

CHRONIQUE | En cette Journée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, c’est l’occasion de se rappeler la parenté funeste entre l’antisémitisme nazi et la haine raciale envers les Noir·es.

En cette Journée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, c’est l’occasion de se rappeler la parenté funeste entre l’antisémitisme nazi et la haine raciale envers les Noir·es.

Dans le film Simone, le voyage du siècle, nous sommes témoins d’une vie hors du commun, celle de Simone Veil. Une vie guidée par une pensée humaniste, toujours d’une cuisante actualité. Cette survivante du camp de concentration d’Auschwitz a plus tard, comme ministre française, légalisé l’avortement en 1974, après s’être battue pour la dignité humaine dans les prisons.

Toute sa vie, Simone Veil sera hantée par « les images, les odeurs, les cris, les humiliations, les coups et le ciel rempli de la fumée des crématoires », dont elle a été témoin dans ces camps.

Le 27 janvier 2005, elle prononçait un discours lors de la cérémonie commémorant le soixantième anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz. Ces propos résonnent encore aujourd’hui.

« Certains [sont] entrés dans le camp, mais pour y servir d’esclaves. La plupart d’entre eux sont ensuite morts d’épuisement, de faim, de froid, d’épidémies ou, eux aussi, sélectionnés à leur tour pour la chambre à gaz, parce qu’ils ne pouvaient plus travailler. »

« Il ne suffisait pas de détruire notre corps », dit-elle. « Il fallait aussi nous faire perdre notre âme, notre conscience, notre humanité. »

Noir·es dans les camps

En cette journée à la mémoire de ceux qui ont vécu et péri par l’Holocauste, il faut reconnaitre que non seulement des Juif·ves, mais aussi des Noir·es ont été déporté·es dans les camps de concentration et d’extermination allemands.

Serge Bilé, dans son livre Noirs dans les camps nazis, nous apprend que les Noir·es, comme non-Aryen·nes, étaient visé·es par les lois de Nuremberg destinées à « protéger le sang allemand ».

Ils et elles furent parmi les premier·ères déporté·es et exterminé·es.

« Un nouvel engagement doit être pris pour que les hommes s’unissent pour lutter contre la haine de l’autre, contre l’antisémitisme et le racisme, contre l’intolérance. »

Simone Veil

La population noire de l’Allemagne provenait de la traite négrière et des expositions exotiques. Certain·es sont des enfants de colons allemands, fruits d’union mixte, enfants impurs. Ces Noir·es étaient Américain·es, Antillais·es ainsi qu’Africain·es.

Ils et elles faisaient, pour plusieurs, partie de la résistance.

Dès les années 1920, la propagande se déploie. Les Noirs comme des dévoreurs d’enfants ou encore des violeurs de femmes blanches, propagande qui a des similitudes avec celle qui a longtemps prévalu aux États-Unis.

Quant à Hitler, il nourrit à l’égard des Noir·es des préjugés nourris par des écrits racialistes, préjugés qu’il relatera dans Mein Kempf.

Ancêtres des camps de concentration

Les camps de concentration ne sont pas une innovation des nazis. En 1904, le gouvernement de Bismarck les a implantés en Namibie pour éliminer le peuple Héréro.

Les crimes vécus par ces Africain·es ont été effacés de nos mémoires. Plus de cent ans après ce génocide, soit en 2021, le gouvernement allemand a finalement reconnu sa responsabilité tout en promettant une compensation financière à la Namibie.

La ségrégation des Noirs américains : un modèle pour Hiller

Dans son livre Caste : The Origins of Our Discontents, Isabel Wilkerson compare les deux systèmes de castes les plus connus au monde : celui de l’Inde, berceau même de la caste, et celui de l’Allemagne nazie, où la caste est devenue une expérimentation moderne de la barbarie.

Elle démontre aussi qu’il existe un système de castes profondément enraciné aux États-Unis, qui avait été mis en place en Virginie coloniale : un système fondé sur le racisme, l’inégalité institutionnalisée et l’injustice. Ce système justifie alors la suprématie blanche.

En cette journée de commémoration de l’Holocauste, notre devoir de mémoire nous impose de nous rappeler que ce système américain fondé sur des lois raciales a inspiré le régime nazi d’Hitler.

Les Noir·es, comme non-Aryen·nes, étaient visé·es par les lois de Nuremberg destinées à « protéger le sang allemand ».

La mise en garde de l’immortelle Simone Veil

La voix de Simone Veil vibre encore aujourd’hui. En 2005, elle disait : « Un nouvel engagement doit être pris pour que les hommes s’unissent, au moins pour lutter contre la haine de l’autre, contre l’antisémitisme et le racisme, contre l’intolérance. »

Elle nous disait aussi que, « venus de tous les continents, croyants et non-croyants, nous appartenons tous à la même planète, à la même communauté d’hommes. Nous devons être vigilants, et la défendre contre les forces de la nature qui la menacent, mais encore davantage contre la folie des hommes. »

Nous ne pouvons, comme les trois singes, nous fermer les yeux, nous boucher les oreilles et nous taire. Ce serait là une inhumaine amnésie. Nous avons tous un devoir, celui des mémoires.

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