Si un Secrétariat à la condition féminine existe déjà, des regroupements féministes demandent à le remplacer par un véritable ministère des Droits des femmes et de l’Égalité, qui serait doté de plus de moyens et d’un réel pouvoir exécutif. Mais le PCQ, la CAQ et le PLQ proposent des alternatives à cela – ou n’en veulent tout simplement pas.
La moitié de la population québécoise est composée de femmes. Crise sanitaire, crise économique, crise climatique : les femmes sont systématiquement désavantagées par ces bouleversements, énonçait un rapport de l’IRIS en 2021.
Pourtant, la question des droits des femmes n’est abordée par le gouvernement au Québec que sous le mandat d’un Secrétariat à la condition féminine. Une vingtaine de regroupements féministes, membres du Groupe des 13 (G13), ont demandé la création d’un ministère des Droits des femmes et de l’Égalité dans une lettre ouverte publiée cette semaine.
« Ces inégalités ne datent pas d’hier, mais aujourd’hui encore, les différents partis politiques se font discrets en ce qui concerne le respect des droits des femmes et la promotion de l’égalité », indiquait dans cette lettre Marie-Andrée Gauthier, coordonnatrice générale du Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec.
Un Secrétariat à la condition féminine existe bien aujourd’hui. Mais Gaëlle Fedida déplore qu’il soit rattaché à la ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest. Pour rappel, les ministres responsables ont uniquement la charge de l’application des lois existantes. Le Secrétariat est « un strapontin au gouvernement », selon la coordinatrice des dossiers politiques à l’Alliance des maisons d’hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2).
Le Secrétariat agit plus à titre d’organe gouvernemental consultatif qu’exécutif, donc. Il « demande la permission », explique la membre de l’Alliance MH2. Or, les enjeux liés à la condition féminine ne doivent pas être un choix dépendant « du bon gré » de chaque ministère, selon elle.
Pour changer cela, les groupes féministes demandent à rebâtir le Secrétariat pour en faire un ministère de plein exercice. « En plus d’ancrer des positions politiques plus fortes, ce nouveau ministère travaillerait de façon transversale plutôt qu’en silo », écrivait le G13 dans sa lettre ouverte.
« Quand un ministère est créé, c’est pour corriger une situation grave. Il est temps d’arriver à l’égalité de fait au Québec en 2022 », fait valoir Gaëlle Fedida.
En 2021, 26 femmes et filles ont été tuées violemment au Québec selon l’Observatoire canadien du féminicide pour la justice et la responsabilisation. Et le nombre de féminicides depuis le début de l’année 2022 annonce déjà un lourd bilan.
« Qu’on ne nous dise pas qu’on ne veut pas créer de ministères : la CAQ en a créé deux », proteste-t-elle. En effet, deux nouveaux ministères ont fait leur apparition en 2022 : le ministère de la Cybersécurité et du Numérique et le ministère de la Langue française.
Le fédéral comme modèle
Le 13 décembre 2018, le gouvernement fédéral a opéré ce changement : l’organisme gouvernemental Condition féminine Canada se transformait pour devenir le ministère Femmes et Égalité des genres Canada (FEGC). Une transition saluée par Gaëlle Fedida, qui y voit un modèle à suivre pour le Québec.
« Pendant ce temps, le fédéral l’a fait et on voit une différence concrète sur le terrain », remarque-t-elle. « Avec une ministre de plein exercice au fédéral, beaucoup plus de choses sont faites », explique-t-elle, notamment en matière de violences conjugales.
Les positions des partis
Dans sa lettre ouverte, le G13 affirmait que la CAQ et le PCQ ne « voyaient pas la pertinence » d’un tel ministère, tandis que le PLQ, le PQ et QS se disaient en faveur. Gaëlle Fedida explique que cette conclusion est issue de consultations préélectorales entre les membres du Groupe des 13 et les différents partis.
Contactée par courriel à ce sujet, la CAQ n’a pas donné suite.
Le PLQ n’a pas confirmé à Pivot son soutien à la création d’un tel ministère. Il a plutôt affirmé que « l’important c’est que [la ministre dédiée au Secrétariat] soit présente et déterminée à affronter les enjeux actuels » et « représente une voix forte au sein du Conseil des ministres ».
De son côté, le PQ souhaite un ministère de la Condition féminine et QS, un ministère Femmes et Égalité des genres.
Mercredi, le chef conservateur Éric Duhaime a déclaré que le Secrétariat, ainsi que le Conseil du statut de la femme, seraient bien remplacés s’il prenait le pouvoir, mais par un ministère de l’Égalité qui serait chargé d’aborder toutes les inégalités sociales à la fois.