AccèsLogis : vital pour le droit au logement des Montréalaises

LETTRE D’OPINION | Le gouvernement peut revenir sur ses intentions d’introduire des logiques du marché dans le développement de logements sociaux. Nous sommes prêtes à travailler de concert avec le gouvernement et les instances concernées pour améliorer AccèsLogis et planifier l’allocation des fonds aux populations et secteurs qui en ont particulièrement besoin.

Il y a un an, Québec a conclu une entente avec Ottawa officialisant plus de 3,7 milliards $ d’investissement pour aider les ménages à se loger. De ce montant, 272 millions $ étaient réservés pour les « priorités du Québec » ce qui devait essentiellement financer le programme AccèsLogis. À la Table des groupes de femmes de Montréal (TGFM), nous avions espoir que cela permettrait de répondre aux besoins intensifiés depuis la pandémie. 

Au contraire, le mini-budget de la CAQ présenté fin novembre annonçait la fin d’AccèsLogis, la cible de 500 nouveaux logements abordables par année et l’intention d’ouvrir le financement aux promoteurs privés à but lucratif. Pire qu’une gifle. C’est un affront pour les femmes en recherche d’un logement adéquat. Cette stratégie signale que la CAQ se moque du droit au logement des femmes. 

Un rapport alarmant

Le logement est une priorité à la TGFM, la crise qui perdure creuse les inégalités. Nous avons publié le 1er décembre dernier un rapport sur le droit au logement des Montréalaises. Notre consultation auprès d’une cinquantaine d’organisations souligne que les difficultés à trouver et conserver un logement adéquat se sont accrues avec la pandémie. 

Davantage de femmes se butent à une pénurie de logements à des prix décents, de taille suffisante et accessible, à de la discrimination ainsi qu’à des hausses de loyers, de l’insalubrité, des reprises et évictions et du harcèlement de la part des propriétaires et du voisinage. Cette crise force les femmes à demeurer dans des contextes de violence et d’abus ou à rester plus longtemps dans des hébergements d’urgence qui sont à pleine capacité. 

Le logement social devrait les aider à s’en sortir. Les listes d’attente qui s’allongent à l’Office Municipal d’habitation de Montréal et dans les groupes témoignent de l’urgence de développer de nouveaux logements sociaux. Et ce bien au-delà des 500 unités « abordables » annuelles annoncées pour l’ensemble du Québec. 

Un programme qui a fait ses preuves

AccèsLogis a permis aux coopératives et OBNL de créer de nouveaux modèles d’habitations. Depuis 2002, les groupes de femmes ont pu développer 38 projets qui aujourd’hui logent plus de 750 femmes seules ou cheffes de familles monoparentales. Elles ont des loyers réellement abordables grâce au programme de supplément au loyer (contrairement à la définition de l’abordabilité au marché que le gouvernement tente d’imposer), le tout dans des milieux de vie accueillants, sécuritaires et qui offrent des services sur place, entre autres, pour soutenir leur épanouissement et leur stabilité résidentielle. Nous doutons sérieusement que les promoteurs à but lucratif soient intéressés et suffisamment soucieux des besoins et réalités diverses des femmes pour développer de tels logements.

Un élan freiné

Après avoir joué un rôle essentiel durant la pandémie, les groupes de femmes, qui sont par exemple des maisons d’hébergement, refuges, OSBL d’habitation et Centres de femmes, sont prêts à s’investir pour le développement de logements sociaux. La fin du programme AccèsLogis freinera nécessairement cet élan. Surtout, l’introduction des promoteurs à but lucratif fera en sorte que les fonds seront disputés avec un plus grand nombre d’organisations qui disposent de plus de ressources que les groupes de femmes sous-financés. 

Il n’est pas trop tard

Le gouvernement peut revenir sur ses intentions d’introduire des logiques du marché dans le développement de logements sociaux. Nous sommes prêtes à travailler de concert avec le gouvernement et les instances concernées pour améliorer AccèsLogis et planifier l’allocation des fonds aux populations et secteurs qui en ont particulièrement besoin. Nous proposons, par exemple, de réserver le tiers des budgets à des logements destinés aux femmes et à leur famille afin d’éviter que les groupes aient à compétitionner pour développer des projets essentiels pour prévenir la violence et l’itinérance et promouvoir l’égalité. 

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