La réputation du métro de Paris n’est plus à faire tant il fait partie de l’ADN de la ville depuis plus de cent ans. D’aucun.e.s le considèrent même comme le meilleur au monde, en particulier en raison de la densité de son réseau et des multiples connexions entre les 16 (bientôt 20) lignes qui le composent – sans parler du RER (Réseau express régional), du tramway, des bus et du train de banlieue. Mais Paris ne se contente pas du statu quo.
En effet, la ville (en partenariat avec l’État français et la région d’Île-de-France) a mis en branle son projet de Grand Paris Express, qui comprend le prolongement de certaines lignes de métro et la construction de 4 nouvelles lignes. Le tout comptant 200 km de voies et 72 nouvelles gares. Du gros, du très gros. Car en France, à gauche comme à droite (la plupart du temps), on considère le transport en commun comme un investissement nécessaire, pas un caprice. Pour preuve : c’est sous la présidence de Nicolas Sarkozy que le projet a été lancé.
Autrement dit : l’important, c’est le réseau, la réponse aux besoins de mobilité. Pas la facture – qui en 2020 était estimée à 42 milliards € (environ 62 milliards CAD). D’ailleurs, ce chiffre peut sembler plus bas que ce qu’il en coûterait chez nous. C’est à la fois vrai et faux. D’une part, dans les prévisions budgétaires que nous faisons au Québec, nous incluons de nombreux éléments qui ne sont pas nécessairement inclus ailleurs (ce qui explique la somme astronomique du « Projet structurant de l’Est »). D’autre part, en France, on n’a jamais vraiment arrêté de construire des infrastructures de ce genre, ce qui a permis de développer une expertise et des pratiques qui, à long terme, entraînent des économies. Au Québec, nous visons trop petit, et paradoxalement, cela nous coûte cher. Nos décideurs, en particulier à l’Assemblée nationale, auraient avantage à s’inspirer d’une si belle ambition pour le transport en commun.
Si on sort un peu de Paris et que l’on regarde la trajectoire des grandes villes françaises depuis quelques années (voire quelques décennies dans certains cas), on remarque une tendance forte : l’élaboration de plans structurés de réduction de la circulation automobile. En la matière, la France semble avoir compris, une quinzaine d’années avant le Québec, que la croissance effrénée du nombre de voitures est incompatible, aussi bien avec les limites physiques des villes (encombrement) qu’avec la préservation de la sécurité et de la santé de la population. Comme chez nous, il arrive souvent que de nouvelles initiatives suscitent des réactions indignées chez des gens dont le nombre est inversement proportionnel à la puissance des cris. Mais on ne recule pas, on prend ses responsabilités.
Prenons l’exemple de Grenoble, qui avait la réputation d’être la ville la plus polluée de France dans les années 1980. Elle a été, en 1987, la première ville au monde à faire rouler des tramways modernes (à plancher bas), ce qui a nécessité le retrait de voies automobiles. De nombreux espaces ont également été piétonnisés, des trottoirs ont été élargis, etc. Une mesure en particulier a attiré mon attention : les traverses à niveau à certaines intersections à l’entrée de zones résidentielles. À ces endroits, la chaussée et les trottoirs sont faits du même matériau (béton) et ne sont séparés que par quelques bollards en métal et des plantations. Cela a pour effet de faire immédiatement sentir aux conducteurs qu’ils n’ont pas la priorité, qu’ils sont des invités et qu’ils doivent faire preuve de plus de vigilance. Tout en embellissant les lieux
Grenoble est également une ville de vélo. Je pourrais mentionner les différentes pistes cyclables qui ont été aménagées sous la gouverne du maire Éric Piolle (élu pour la première fois en 2014), mais je préfère un aspect plus original : le système Métro Vélo + (ou Mvélo+). Aujourd’hui, il propose la location de vélos de différents types (réguliers, pliables, électriques, cargos, etc.) pour des durées allant d’un jour à un an. C’est un système sans bornes ou stations (contrairement à Bixi ou àVélo chez nous) qui permet donc de s’« approprier » un vélo pour une certaine durée et donc de tester le mode de vie à deux roues. Le résultat est frappant : on en voit partout en ville, d’autant que leur couleur jaune les distingue clairement.
Certaines choses que l’on fait mieux que les cousins
Parlant de vélo, j’aime bien le répéter: nous avons de quoi être fier.e.s de Bixi (et son petit frère àVélo). Notre système, qui a été implanté environ 4 ans après la première génération de Vélib’ à Paris (maintenant remplacée par une seconde génération), ne cesse de s’améliorer d’année en année. Si les deux sont comparables en termes d’offre de service (toutes proportions gardées), l’usager de Bixi arrivé à Paris rencontrera quelques désagréments. D’une part, l’état des vélos est, pour le dire poliment, très inégal là-bas. Combien de fois doit-on tester trois, quatre, cinq vélos avant d’en trouver un en bon état… et il n’est possible de signaler un vélo brisé que si l’on utilise l’application (alors que Bixi, depuis le jour 1, dispose d’un bouton permettant de signaler et bloquer un vélo brisé). De plus, le retour d’un Bixi en station est beaucoup plus efficace et facile que celui d’un Vélib’ (pour lequel il faut parfois s’y prendre à de nombreuses reprises avant que le vélo soit bien « restitué »… et il faut être vigilant, car il peut parfois être « bloqué » dans une station sans que le système n’ait reconnu sa « restitution »).
Par ailleurs, si Paris et Montréal se ressemblent par l’opportunité que leurs mairesses ont saisie d’accélérer le développement du réseau cyclable pendant la pandémie de Covid-19, on peut reconnaître au moins un avantage de l’approche de l’équipe de Valérie Plante par rapport à celle d’Anne Hidalgo. En effet, à Paris, de nombreuses nouvelles pistes sur des axes importants (pensons à la rue de Vaugirard) sont encore élaborées en mode bidirectionnel, alors que le REV montréalais (et même des pistes qui ne sont pas du REV, comme celle de l’avenue Des Pins) est unidirectionnel. Et à Paris, certaines pistes unidirectionnelles sont passablement étroites, limitant les dépassements et augmentant les chances qu’elles se retrouvent bloquées.
Pour terminer, j’aimerais revenir au métro. Plus particulièrement à l’accessibilité de celui-ci. On déplore parfois le manque d’ascenseurs dans celui de Montréal. Or, depuis quelques années, un rattrapage important est effectué, notamment dans les principales stations. Et si l’on ne dispose pas d’un ascenseur, il reste toujours les escaliers roulants (qui ne conviennent pas aux personnes en chaise roulante, mais peuvent être utiles pour les personnes âgées et d’autres personnes ayant certaines limitations fonctionnelles) et ce, dans chacune des stations. À Paris, la proportion de stations munies d’ascenseurs est plus faible… et on ne peut pas dire que la présence d’escaliers roulants (ou « escalators » comme ils disent) soit une constante non plus. Les deux villes ont encore beaucoup à faire, mais j’en retire l’impression que l’engagement de Montréal en ce sens est plus fort. Des échos qui sont parvenus à mes oreilles il y a quelques années m’ont appris que la STM plancherait déjà sur les plans d’installation d’ascenseurs dans les stations restantes, mais qu’il manque le financement pour les réaliser. Une fois de plus, il faudra se tourner vers le gouvernement québécois pour arracher ce qui pourtant devrait aller de soi…