Être dans la rue, ce n’est pas un choix, c’est un enfer

LETTRE D’OPINION | Il est temps d’agir. En fait, il était temps d’agir hier.

Cet hiver, l’organisme Exeko a mis en œuvre une série d’ateliers au PAS de la rue lors desquels des personnes qui fréquentent cet organisme ont eu l’occasion de réfléchir à la notion de cohabitation sociale. Ces échanges ont fait émerger plusieurs constats que nous vous transmettons.

Cette lettre s’adresse aux personnes en position décisionnelle – les élu·es, les patron·nes, les personnes ayant une capacité d’influence – mais aussi à tou·tes celles et ceux qui souhaitent un meilleur équilibre entre les divers groupes sociaux.

Nous sommes un groupe de personnes habitant le centre-ville de Montréal et fréquentant régulièrement les milieux culturels afin de développer nos connaissances des cultures et élargir nos horizons.

Ayant en commun d’avoir vécu une grande précarité financière, nous apportons nos voix au débat actuel au sujet de la mixité sociale dans l’objectif de favoriser une meilleure inclusion pour le bien être de tou·tes. Nous réclamons des changements urgents en termes de cohabitation sociale.

Notre constat est qu’il est urgent plus que jamais d’unir l’ensemble de la société sur ces enjeux pour que toute la population se sente concernée dans l’apport de solutions durables.

Riches de nos expériences de précarité – perdre son logement et son sentiment de sécurité, dormir dans la rue ou encore de ne pas recevoir l’aide nécessaire par manque de ressources –, nous nous devons de partager les difficultés liées à cette longue expertise qui dure depuis trop longtemps.

La prévention, toujours la prévention

En tant que citoyen·nes à part entière de la ville de Montréal, il est regrettable et même incompréhensible de constater que nos droits fondamentaux sont parfois inaccessibles, d’autre fois tout simplement bafoués.

Être dans la rue en 2023, ce n’est pas un choix, c’est un enfer!

Selon nous, l’augmentation des personnes sans-abri est tout simplement inacceptable. Devons-nous être rendu·es dans la rue pour être considéré·es précaires et recevoir de l’aide? Nous avons besoin d’aide en amont, en prévention! Nous avons besoin d’un ministère de la Précarité.

Malgré l’urgence de nos situations, il nous apparaît important de faire rayonner l’excellent travail des intervenant·es du milieu communautaire qui doivent conjuguer leurs horaires trop chargés avec le manque de ressources. Ces équipes font des miracles. Elles méritent aussi votre soutien!

Des solutions peu convaincantes

Des solutions sont proclamées, mais l’action sur le terrain est constamment modifiée, retardée, voire même annulée en défaveur des personnes dans le besoin.

Par exemple, nous ne voyons pas arriver les bénéfices du Règlement pour une métropole mixte, aussi connu comme règlement 20-20-20, en vigueur depuis 2021, censé garantir des logements sociaux, abordables et familiaux lors des nouveaux développements. Il nous apparaît inconcevable qu’il puisse s’écouler plusieurs années avant que les sommes récoltées soient utilisées pour la création des logements dont nous avons besoin. Nous nous questionnons sur ce qui est fait par l’administration municipale pour concrétiser les bénéfices de ce règlement, particulièrement dans les quartiers en gentrification, dont fait partie le secteur des Faubourgs.

Un autre exemple est celui de l’église Sainte-Brigide, située dans le quartier Centre-Sud, tout près du PAS de la rue. C’est un bâtiment dans lequel nous avons tenu des activités pendant la pandémie, en cohabitation avec d’autres organismes communautaires. Malheureusement, ce lieu n’est maintenant plus sécuritaire. Nous voyons un potentiel pour l’utilisation de ce bâtiment, mais nous avons besoin de l’implication financière des gouvernements pour le rénover et le transformer en lieu de rencontre et de soutien communautaire. Il y a un manque criant de tels espaces dans le quartier et ce ne sont pas les idées qui manquent.

Nous voulons faire partie de la solution.

Aurez-vous le courage?

Collectivement, nous avons tout ce qu’il faut pour régler nos problèmes sociaux. Nous avons l’argent. Nous avons les expertises. Nous avons les idées. Avez-vous la volonté?

Il est temps d’agir. En fait, il était temps d’agir hier.

Nous vous invitons cordialement à venir nous rencontrer, chères personnes d’influence. Permettez-nous de tenter de vous faire comprendre ce que c’est que de vivre l’itinérance et la précarité. Venez être témoins de notre humanité et de celle de nos ami·es qui sont présentement sans-abri. Soyez témoin de la force de notre entraide et de la beauté du courage émanant de l’adversité.

* Les propos contenus dans cette lettre reflètent l’opinion et l’analyse de son collectif de rédaction et non celles du PAS de la rue.

Signataires

David Albert

Bernard Bazouamon

Marcel Beauchamp

Réjean Beauregard

Serge Boisvert

Denis Bonin

Pierre Boyer

Yvon Chamberland

Réjean Chevarie

Maëva Cloutier

Daniel Gaudry

Donald Jean

Pierre-Marie Lagacé

Linda Morand

Stéphane Neveu

Vianney Ouellet

Lyse Perreault

Raymond Plante

Augustin Salivas

Michel Sénécal

Avec le soutien de :

Valérie Richard, médiatrice chez Exeko

David Touchette, médiateur chez Exeko

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