La crise climatique actuelle touche disproportionnellement les populations marginalisées. Ce qui demande de nous organiser pour bâtir des stratégies de résilience qui priorisent les soins et protègent les groupes vulnérables. Le festival Brûlances qui se déroule présentement offre quelques pistes.
Parfois l’ironie prend des airs de fatalité, il me semble.
Les feux de forêt se multiplient et menacent de raser le pays d’un océan à l’autre. Après avoir dominé le ciel la semaine dernière, le soleil se cache maintenant derrière un nuage de fumée, ne laissant paraître qu’un halo inquiétant aux airs de fin du monde.
Et c’est à ce moment que commence la première édition de Brûlances, le festival qui reprend la tradition de la défunte Radical Queer Semaine. Plutôt ironique.
Une programmation festive, évidemment, mais surtout axée sur la communauté et ses pratiques qui se déroule principalement au Centre culturel George-Vanier du 7 au 11 mai.
Une invitation au partage et à l’action dans un contexte d’urgence face à la catastrophe écologique et sociale qui nous pend au bout du nez.
Une invitation au soin, aussi, avec des ateliers sur l’autoérotisme, le consentement et le queer embodiment, par exemple.
Une invitation à l’échange intergénérationnel qui est encore si difficile et combien nécessaire, des décennies après que la crise du SIDA ait décimé cette génération qui n’a pas eu – ou trop peu – le temps de nous enseigner à vivre. Il y a des luttes importantes à mener pour les aîné·es, qui n’ont pas rien à voir avec la déclaration du comité d’organisation du festival concernant le port du masque d’ailleurs.
Se rencontrer, prendre soin
La fatalité, c’est que la crise provoquée par l’embrasement des vastes forêts d’Amérique du Nord touche plus durement les populations âgées et atteintes de maladies chroniques, par la présence d’irritants atmosphériques.
Elle rend aussi plus vulnérables les populations pauvres, moins bien équipées pour l’assainissement de l’air. Les riches ne respirent pas le même air, et nos communautés ne sont pas riches.
Ajoutons les menaces directes à la sécurité : rien que dans la province, des membres de nations cries, innues, atikamekw et anishnaabe font aussi déjà partie des réfugié·es climatiques.
Cette tragédie annoncée est directement causée par les systèmes d’oppression auxquels des rassemblements comme Brûlances appellent à résister.
Plus que jamais nous aurons besoin de prendre soin les un·es des autres, alors que notre santé s’affaiblit et que notre précarité augmente. Cet accent mis sur le soin est nécessaire et doit nous amener à développer rapidement des stratégies collectives de résilience qui permettent de soutenir notre révolte.
C’est donc dire que de la fatalité à l’opportunité, il n’y a qu’un pas. Ce pas, on dirait que l’histoire, par ses étranges coïncidences, nous appelle à le faire vers plus de soin, de maillage intergénérationnel et de coalition.
Évidemment, un festival – même pendant le mois de la fierté – n’a pas le pouvoir à lui seul de créer cet élan de support mutuel, pas plus qu’il ne répond aux besoins matériels très réels qui le sous-tendent. Il peut toutefois proposer des façons de se rencontrer et offrir un havre au milieu de l’apocalypse pour se poser avant de repartir de plus belle.
Il suffit parfois d’une étincelle.