
Article de l'Initiative de journalisme local
Les cyberviolences sexuelles contre les enfants atteignent rarement les tribunaux
Alors que l’exploitation et la violence sexuelle en ligne contre les enfants augmentent à une vitesse fulgurante au Canada, encore peu de victimes obtiennent justice.
Parmi les cas d’exploitation et de violence sexuelle en ligne contre les enfants qui sont déclarés par la police, seule une faible proportion est traduite en justice. Il s’agit de moins d’un cas sur dix, et cela en dépit de la hausse fulgurante de ces types de violences sexuelles au pays depuis la pandémie.
Selon les plus récentes données d’un rapport de Statistique Canada paru jeudi, seulement 9% des crimes d’exploitation ou de violence sexuelle en ligne contre les enfants déclarés à la police sont portés devant les tribunaux.
Les crimes liés à l’exploitation et la violence sexuelle contre les enfants sur internet comprennent la possession, la production, la distribution ou l’accès à la pornographie juvénile, la manipulation psychologique et le leurre informatique, le sextage et la sextorsion.
Toujours selon ce même rapport, les cas impliquant de la pornographie juvénile seraient particulièrement rares à accéder aux tribunaux, avec un taux de 5%, comparativement à 19% pour les autres cas de cyberinfraction sexuelle contre les enfants.
Les auteur·es de ce genre de crimes ont été identifiés dans seulement 24% des cas déclarés par la police. Une majorité des enquêtes (76%) est abandonnée par les autorités pendant leur cheminement, avant que l’affaire soit résolue et qu’un·e auteur·e soit identifié·e. Cela s’expliquerait par la complexité du processus d’enquête et de l’identification des victimes et des contrevenant·es en ligne.
Dans l’ensemble, une fois présentées devant les tribunaux, 77% des causes se soldent par un verdict de culpabilité, dont 86% reçoivent une peine d’emprisonnement.
La pointe de l’iceberg
Dans un rapport précédent faisant état de la situation, Statistique Canada avait signalé une hausse des cyberviolences sexuelles contre les enfants entre 2014 et 2020. En 2014, on recensait 50 affaires pour 100 000 enfants, alors qu’en 2020 cette proportion est passée à 131 affaires pour 100 000 enfants.
Cette hausse, particulièrement importante en 2020, avait été associée au confinement instauré pendant la pandémie qui aurait restreint la possibilité de commettre de tels crimes en personne.
Par ailleurs, les données recensées dans les rapports de Statistique Canada ne se limitent qu’aux cas rapportés par la police, ce qui signifie que ces chiffres pourraient ne représenter qu’une partie de la réalité.
Le Centre canadien de la protection de l’enfance signale quant à lui une augmentation de 815% des leurres sexuels en ligne contre les enfants qui lui ont été signalés depuis 2013.
Ce type d’infraction consiste à communiquer directement avec un enfant à travers des plateformes comme Snapchat ou Instagram afin de commettre une infraction sexuelle contre lui ou elle.
Cette hausse aurait été encore plus marquée pendant la pandémie, passant de près de 500 signalements en 2020 à plus de 2000 en 2022.