Photo: Charlotte Marschall
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Les troubles anxieux et dépressifs continuent d’augmenter chez les jeunes

Cela pourrait s’expliquer notamment par une multiplication des facteurs de stress et une meilleure reconnaissance des symptômes.

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Le taux d’anxiété et de dépression parmi les jeunes âgé·es de 15 à 29 ans a connu une hausse entre 2018 et 2021, particulièrement chez les femmes. Cela pourrait notamment indiquer une meilleure reconnaissance des troubles mentaux qui pousserait plus de personnes à aller chercher de l’aide. 

En 2021, 6,7 % des 15 à 29 ans ont reçu un diagnostic de troubles anxio-dépressifs, contre 5,8 % en 2018. Ces troubles regroupent un ensemble de maladies qui incluent notamment les dépressions majeures, les troubles de panique et les troubles d’anxiété généralisée. 

La hausse est particulièrement criante chez le sous-groupe des plus jeunes, âgé·es entre 15 à 19 ans. Après avoir connu un creux de 3,6 % en 2008, le taux de troubles anxio-dépressifs a grimpé à 6,1 % en 2021. 

C’est ce que montrent les dernières données de l’Institut national de santé publique du Québec. 

Par ailleurs, cette hausse est particulièrement élevée chez les filles et les jeunes femmes. Ce sont elles qui démontrent une forte augmentation constante depuis 2018. Cette année-là, 7,3 % d’entre elles avaient reçu un diagnostic de troubles anxio-dépressifs. En 2021, cet indice a atteint 9,3 %. 

C’est plus que le double des garçons et des jeunes hommes. Chez eux, les troubles n’ont aussi connu qu’une très légère hausse durant la même période, passant de 4 % en 2018, à 4,3 % en 2021. 

« C’est connu, les femmes et les filles rapportent toujours plus souvent d’anxiété, peu importe le genre de formulaire utilisé », explique la doctorante au département de psychologie de l’Université de Montréal, Audrey-Ann Journault. 

En ce qui concerne les troubles anxio-dépressifs diagnostiqués, elles sont aussi surreprésentées, mais il est difficile de savoir si elles sont réellement plus affectées ou si elles ont plus tendance à rechercher que les hommes, selon la chercheuse.

Pour Catherine Burrows, directrice générale adjointe de la Fondation jeunes en tête, la hausse des diagnostics est potentiellement un signe que la sensibilisation effectuée par les organismes comme le sien porte fruit. 

« Les jeunes sont plus portés à en parler et à demander de l’aide, ce qui est vraiment une bonne nouvelle », explique-t-elle. « Ils sont mieux équipés que les jeunes d’il y a vingt ans pour savoir ce que sont la dépression et l’anxiété, et ils connaissent leurs symptômes. » 

Quand l’anxiété fait boule de neige 

Il est important d’aider les jeunes à développer une tolérance à l’incertitude – source de stress particulièrement accrue par le contexte social actuel – signale Catherine Burrows. 

« Les jeunes sont dans un climat d’incertitude plus intense que pour d’autres générations », note-t-elle en énumérant l’écoanxiété, la dépendance à la technologie et la pression de performance comme exemples de facteurs aggravants.

« L’anxiété est une réaction de stress face à un stresseur qui est anticipé, c’est-à-dire à venir dans le futur. Ce n’est pas négatif en soi. »

Audrey-Ann Journault

Développer une résistance au stress chez les jeunes est également primordial, pour Audrey-Ann Journault. Dans ses recherches, elle examine la « sensibilité à l’anxiété » : un phénomène où les symptômes de l’anxiété – le souffle court, un rythme cardiaque élevé, les mains moites – qui génèrent une réponse anxieuse plus grave. 

Cela créerait un cercle vicieux qui, à long terme, peut générer des troubles anxieux chez les jeunes. 

« L’anxiété est une réaction de stress face à un stresseur qui est anticipé, c’est-à-dire à venir dans le futur », rappelle-t-elle. « Ce n’est pas négatif en soi ». Or, « la sensibilité à l’anxiété est ancrée dans la croyance que ses manifestations physiques de l’anxiété sont nuisibles », explique-t-elle.

Un manque de services

Tandis que les jeunes sont de plus en plus nombreux·ses à recevoir un diagnostic, le système de santé peine à combler les besoins en santé mentale. 

« Aujourd’hui, [les jeunes] sont mieux équipés qu’il y a vingt ans pour savoir ce que sont la dépression et l’anxiété, et ils connaissent leurs symptômes. » 

Catherine Burrows

« Le problème présentement, c’est les listes d’attente », explique Catherine Burrows en référence aux délais d’accès à des services en psychologie. « Les jeunes demandent de l’aide, mais on se questionne à savoir si le système de santé est apte à recevoir leurs demandes. » 

Notons que le nombre de psychologues en milieu scolaire continue de diminuer au Québec. En 2020-2021, on n’en recensait que 939 à travers toute la province, selon le ministère de l’Éducation. 

Catherine Burrows rappelle que d’autres services plus facilement accessibles, en travail social notamment, sont parfois adéquats pour répondre à certains troubles de santé mentale, dépendamment de la sévérité des symptômes.

Clarification : Des modifications ont été apportées pour ajuster la définition de l’anxiété et préciser son recensement auprès des filles et des femmes. (01-12-2022)

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