François Legault a prononcé le discours inaugural de la nouvelle session parlementaire le mercredi 30 novembre 2022 | Photo : Assemblée nationale
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La marchandisation de l’éducation au menu de François Legault?

Le premier ministre a décrit l’éducation supérieure comme une façon de satisfaire aux besoins des entreprises et de protéger le français, une vision qui inquiète les fédérations étudiantes.

François Legault a évoqué l’éducation supérieure à plusieurs reprises dans son discours inaugural, mercredi. Il souhaite notamment « mettre ensemble » la recherche académique et les entreprises, voir les étudiants se diriger d’abord vers les « domaines stratégiques », ou encore faire des cégeps et universités francophones une pièce importante du « modèle d’immigration » de la province.

Alors qu’il annonçait les priorités de son gouvernement pour la nouvelle session parlementaire, mercredi à l’Assemblée nationale, François Legault a dit vouloir faire de l’éducation « la priorité des priorités ». L’essentiel de son discours a pourtant porté sur son désir de réduire l’écart de richesse entre le Québec et ses voisins, dont l’Ontario, et de « renverser la tendance » du déclin du français dans la province.

Pour y arriver, il mise notamment sur l’apport des cégeps et universités qu’il souhaite voir devenir « des générateurs de richesses ». Pour ce faire, il veut « mettre ensemble la recherche appliquée de nos universités et de nos cégeps avec des entreprises ».

Une proposition qui inquiète la présidente de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), Maya Labrosse. « En arrimant le privé et la recherche, les chercheurs en viennent à rendre des comptes aux compagnies privées. Aussi, ça limite les sujets de recherche qu’on peut faire », dénonce-t-elle.

De son côté, la présidente de l’Union étudiante du Québec Samy-Jane Tremblay tient à rappeler au gouvernement que l’un des principaux enjeux actuels en recherche est la capacité des chercheur·euses à vivre décemment. Elle rappelle que les bourses à la recherche du provincial sont nettement insuffisantes et trop peu nombreuses.

Selon elle, la situation actuelle mène beaucoup trop de chercheur·euses à abandonner leurs études pour des raisons financières. « Le Québec perd des talents vraiment incroyables, qu’il ne peut pas se permettre de perdre », déplore-t-elle.

« En arrimant le privé et la recherche, les chercheurs en viennent à rendre des comptes aux compagnies privées. »

Maya Labrosse, présidente de la FECQ

Le problème des bourses dédiées

Le premier ministre a également profité de son discours pour inviter les étudiant·es à se diriger vers les domaines affectés par la pénurie de main-d’œuvre, notamment ceux du génie et des technologies de l’information. « Il faut inciter plus de jeunes à s’inscrire [dans ces domaines], on a déjà mis des bourses de 1500 $ par session au cégep et de 2500 $ à l’université. Mon message aux jeunes : profitez-en, allez-y, on a besoin de vous autres. »

Un appel qui préoccupe Maya Labrosse, qui conteste le bien-fondé de ces bourses. « Ce n’est pas efficace, parce qu’on donne des bourses dans des programmes hautement contingentés. Si l’on veut inciter des gens à se joindre à ses domaines, il faut augmenter leur capacité d’accueil. L’incitatif financier n’y changera rien », explique-t-elle.

Pour faciliter la transition entre les études et le marché de l’emploi, les deux présidentes encouragent plutôt le gouvernement à reconnaitre le travail des stagiaires en mettant fin aux stages non rémunérés.

Plus d’étudiant·es étranger·ères

François Legault a aussi affirmé à trois reprises qu’il souhaitait voir plus d’étudiant·es étranger·ères se joindre aux établissements scolaires francophones. « C’est bon pour la langue, bon pour l’économie, bon pour la démographie, alors c’est vers ce modèle d’immigration qu’on va tendre vers l’avenir », remarque-t-il.

Une proposition accueillie favorablement par les fédérations étudiantes. Elles rappellent toutefois que plusieurs problèmes devront préalablement être résolus si l’on veut augmenter le nombre d’étudiant·es de l’international. « On ne peut pas juste marchandiser les étudiants internationaux et les recruter de façon massive. Il faut leur donner des conditions d’études adéquates si l’on veut qu’ils s’épanouissent au Québec par la suite », prévient Maya Labrosse.

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