Nuit des sans-abri : lettre aux élus, ces grands absents

Cher·es élu·es,

En cette 33e Nuit des sans-abri montréalaise, nous avions pensé vous inviter tou·tes d’une façon officielle, mais nous avons plutôt décidé de vous appeler « les Grands Absents ».

Nous avions aussi pensé vous donner un tour de parole, comme le veut la tradition, mais les gens débarquent trop souvent avec des discours remplis d’empathie qui ne font que me montrer que les paroles en l’air font partie intégrante de la majorité des problèmes de notre société québécoise.

Nous pourrions rédiger des invitations personnalisées pour chacun·e d’entre vous, mais nous nous rendons compte que ça ne sert à rien d’inviter les Grands Absents. Ça ne sert plus à rien de vous garder en tête et de s’adresser poliment à vous pour espérer un jour recevoir de l’aide.

Nous constatons qu’à vos paroles vides nous avons les oreilles sourdes.

Nous avions pensé vous donner un tour de parole, comme le veut la tradition, mais les gens débarquent trop souvent avec des paroles en l’air.

Sept ans après le dévoilement de la Politique nationale de lutte à l’itinérance, plusieurs villes du Québec connaissent encore des débordements et plusieurs régions sont sous-financées et mal-informées.

Reste que cette Politique a représenté une avancée considérable dans le combat mené depuis 2005 par les différents agents du milieu communautaire.

Dans cette politique, cinq axes d’interventions prioritaires sont mis de l’avant. Niveau logement, la politique mise sur « travailler localement à l’accompagnement des personnes en situation de vulnérabilité afin d’agir en amont de l’hébergement d’urgence pour les personnes en situation d’itinérance ». Il est impératif d’investir pour rendre accessible le logement social, mais aussi pour que le soutien communautaire soit suffisant afin que les personnes qui retrouvent un logement ne retournent plus à la rue.

La pandémie nous a aussi prouvé à quel point l’accès aux services sociaux et de santé est un enjeu majeur, non seulement auprès des communautés les plus vulnérables, mais aussi pour toute la population.

Parlons revenu maintenant. La Politique conseille de « maintenir le soutien financier d’urgence pour les personnes dont les besoins de base sont menacés ». Aujourd’hui en 2022, l’aide sociale est bien maigre, on stagne.

Sept ans plus tard, en éducation, il est encore impossible d’aller à l’école et d’obtenir son diplôme d’études secondaires tout en étant prestataire de l’aide sociale.

Pour ce qui est de l’insertion socioprofessionnelle, si on ne fait pas affaire avec un Centre Jeunesse Emploi, il sera impossible de trouver une liste de programmes d’apprentissage ou de réinsertion professionnelle subventionnés par l’État.

On stagne, Grands Absents, on stagne.

Nous constatons qu’à vos paroles vides nous avons les oreilles sourdes.

Nous invitons les Grands Absents pour qu’ils se joignent à nous en tant qu’humains, non pas pour représenter leur ville, leur arrondissement, leur parti politique, ni leur corporation. Nous vous invitons d’humain·es à humain·es, de citoyen·nes à citoyen·nes.

Êtes-vous curieux·ses de nature? Joignez-vous à nous, chers Grands Absents pour partager un moment chaleureux et discuter d’enjeux qui touchent nos citoyen·nes les plus vulnérables.

Soyez présent·es avec vos cœurs, avec votre senti et avec votre empathie. Laissez votre raison et vos contraintes administratives ou institutionnelles de côté et venez en grand nombre, Grands Absents, prendre contact authentiquement avec les invisibles de notre société, qui ont tant besoin que vous vous saisissiez des pouvoirs qui vous sont donnés afin de faire respecter les droits et améliorer les conditions de vie de toutes et tous.

Juan Mondragon est intervenant de proximité à CACTUS Montréal et membre du comité organisateur de la Nuit des sans-abri Montréal.

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