Devant l’inaction, (auto)ventilation!

Encore quatre ans de la même chose. Dur à croire, mais c’est ainsi.

Est-ce que le scandale lié au généreux recours à la firme McKinsey poussera finalement le gouvernement caquiste à mettre sur pied une commission d’enquête indépendante sur la gestion de la pandémie? À améliorer ses protocoles de prévention de la COVID-19? Probablement pas.

À moins qu’une très grande pression soit exercée sur l’exécutif de Legault – le genre de pression qui nécessite des blocages, des grèves, des piquetages, des occupations et des manifestations ingérables –, nous assisterons fort probablement au même étalage de médiocrité xénophobe, néolibérale et méprisante qu’on a connu pendant le précédent purgatoire politique.

Croisons-nous les doigts très forts pour que l’épidémie de variole simienne ne dégénère pas davantage, ou qu’une grippe aviaire ne franchisse pas la frontière inter-espèces pendant les prochaines rotations de la planète, car nous serions alors dans de beaux draps. Le très sagace Ed Young, dans The Atlantic, ouvre son dernier papier sur la pandémie aux États-Unis en titrant « tout ceci se reproduira ». En effet.

Nous assisterons fort probablement au même étalage de médiocrité xénophobe, néolibérale et méprisante qu’on a connu pendant le précédent purgatoire politique

Pour une santé publique populaire et solidaire

Donc, tout en maintenant la pression sur le gouvernement, puisqu’il le faut bien, pourquoi ne pas passer à l’action par nous-mêmes? La praxis, la création et l’organisation concrète sont les meilleurs remèdes contre la déprime politique. En matière sanitaire, il faudra véritablement « autogérer » la pandémie, en créant de facto une santé publique populaire.

Je ne parle pas de la version libertarienne de l’autogestion prônée par Arruda, Legault et puis Boileau : attrape donc la COVID, c’est ton problème, arrange-toi, c’est ton corps et ton capital-santé, l’État a d’autres choses à faire (ou ne pas faire). Non, il s’agirait vraiment d’une version libertaire, solidaire, de proximité, d’aide mutuelle, ancrée dans le soin et la réduction des méfaits.

Elle existe déjà, en quelque sorte. Pendant le plus fort de la pandémie, plusieurs acteur·trices ont entrepris de démystifier et vulgariser la science autour de la COVID-19, notamment ses modes de transmission, pour aider la population à mieux gérer ses risques.

La praxis, la création et l’organisation concrète sont les meilleurs remèdes contre la déprime politique.

Or, l’information ne s’est pas rendue à tout le monde. Beaucoup de gens minimisent encore la possibilité d’attraper la COVID longue, qui fait des ravages. On estime à 330 000 le nombre de personnes qui en seraient présentement affectées au Québec. Plusieurs ne savent pas que dans les six premiers mois de 2022, nous avons dépassé les décès de toute l’année 2021. Il y a encore du travail à faire pour pallier la désinformation stratégique du gouvernement Legault, qui désire simplement faire régner le fog of war sur ce qui se déroule sur le terrain.

L’étape d’après implique d’agir sur le réel, sur les environnements dans lesquels nous évoluons au quotidien.

Petit rappel concernant les fameuses surfaces et les mains : les contaminations à la COVID-19 à partir d’un contact avec une surface représentent environ un millième des contaminations totales. Le reste est aérien. On n’arrivera à rien en se vautrant dans le gel hydroalcoolique, il faut impérativement purifier l’air et porter des masques au besoin.

Dans les restos, dans les bars, dans les cinémas, les locaux d’enseignement, dans les clubs, dans les cafés, dans les libraires, les locaux communautaires, les salles de spectacle, les gyms et les salles de yoga, il faut filtrer l’air. D’abord, c’est bon pour les entreprises et les organismes : toujours agréable quand le staff, les client·es et les usager·ères ne tombent pas malades chez vous. Ensuite, c’est bon pour la vie sociale.

Mais comment diable purifier l’air avec des filtres HEPA (filtre à haute efficacité) si le gouvernement ne fait rien pour aider la cause, s’il ne fournit pas lui-même des appareils ou des subventions pour en acheter? C’est simple, en les fabriquant soi-même!

Les cubes Corsi-Rosenthal pour « vivre avec le virus »

Les cubes Corsi-Rosenthal sont des petites machines à filtrer l’air qui ont été inventées par deux ingénieurs en ventilation. Ils sont très faciles à fabriquer, en plus d’être peu coûteux. Il suffit de quelques filtres industriels, d’un ventilateur de 20 pouces et de duct tape : des matériaux ordinaires qui peuvent s’acheter pour moins de 100 $. Les instructions sont simples et abondantes.

L’efficacité de ces filtres maison est comparable à la norme HEPA. Bref, il s’agit d’un outil essentiel pour réduire les risques de contamination liés à tout évènement social dans un local fermé.

Le mouvement étudiant, au collégial et dans les programmes universitaires, serait très bien placé pour entreprendre la pose de filtres à air dans les salles de cours et autres locaux de l’éducation supérieure, tout en utilisant sa capacité d’action pour disséminer la solution partout autour.

De plus, les petits commerces peuvent agir beaucoup plus efficacement que le gouvernement, qui n’est après tout qu’une machine bureaucratique incapable d’innovation et dont le principal objectif, de toute manière, est le maintien du statu quo. Comme le dit souvent la physicienne Nancy Delagrave, il suffirait d’afficher le taux de C02 en particules par million pour connaître le niveau de risque d’un commerce donné.

À quoi bon servir du tartare de bœuf à 70 $ le plat si vos clients s’infectent à la COVID en discutant placements éthiques? On ferait des pieds et des mains pour la salmonellose ou E. coli, mais pas pour la COVID-19, avec son taux de létalité important? Complètement absurde!

Comme ACT UP! l’a fait avec courage durant le plus fort de la crise du VIH-sida, n’attendons personne pour nous protéger des virus, tout en déployant solidarité et créativité. Les solutions n’arriveront pas d’en haut.