Inéquitable, la relance économique rend les femmes vulnérables à l’inflation

Les effets de la pandémie sur l’emploi, mais aussi la stratégie de relance économique, ont creusé les inégalités entre hommes et femmes.

La situation économique des Canadiennes a reculé par rapport à celle de leurs confrères masculins durant la pandémie, et même durant la reprise, selon un récent rapport du Centre canadien de politiques alternatives (CCPA). Elles sont donc devenues plus vulnérables aux aléas de l’économie et auront plus de difficultés à s’adapter à l’inflation que les hommes.

Les femmes ont été frappées plus durement que les hommes durant la pandémie, puis elles sont restées un pas derrière eux à chaque étape de la reprise économique, explique l’économiste et auteure du rapport Katherine Scott. Selon son analyse, 60 % des emplois perdus durant la pandémie étaient occupés par des femmes.

« Elles ont aussi perdu leur emploi pendant plus longtemps, ont davantage réduit leurs heures travaillées et ont plus souvent dû renoncer à revenir au travail », observe Katherine Scott.

« Normalement, les femmes sont moins touchées par les crises économiques, puisque les crises affectent plus les domaines traditionnellement masculins comme la construction et la production manufacturière », explique l’économiste à l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) Julia Posca. Mais cette fois-ci, les secteurs à majorité féminine, tels que la restauration, le commerce de détail et l’hébergement ont été touchés plus durement par les fermetures, explique-t-elle.

Le double fardeau des mères

La fermeture des écoles a aussi contribué à précariser les femmes, remarque Katherine Scott. Les femmes portent généralement le fardeau des tâches ménagères et celui-ci a augmenté considérablement en raison du télétravail et de la présence des enfants à la maison, rappelle-t-elle.

« C’est une forme de travail non rémunéré qui est imposé aux femmes », résume-t-elle.

C’est particulièrement vrai pour les mères monoparentales, de loin celles qui ont subi les pires contrecoups économiques reliés à la pandémie, précise la chercheuse. « Elles ont perdu leurs réseaux d’entraide et n’avaient souvent pas accès à des garderies. Elles se sont retrouvées sans options et sont restées prises dans un cercle vicieux qui les empêche de retrouver un emploi », devant s’occuper seules de leurs enfants, explique-t-elle. En effet, en décembre dernier, la participation des mères monoparentales canadiennes au marché du travail était toujours 30 % en deçà de son niveau prépandémique remarque l’économiste.

Des mesures de relance inéquitables

Les femmes ont également été désavantagées par les mesures de relance économique mises en place par les gouvernements, selon le rapport. Les interventions gouvernementales ont d’abord dynamisé la reprise dans les domaines où les hommes sont majoritaires, tels que la construction, l’immobilier et l’informatique, explique Katherine Scott.

Cette stratégie de relance a contribué à creuser l’écart entre la situation économique des hommes et des femmes au pays. Cette inéquité pourrait expliquer en partie pourquoi les femmes ont pris plus de temps à retrouver le niveau d’emploi d’avant la pandémie, explique la chercheuse.

Les mesures visant à relancer l’économie en périodes de crise ont généralement tendance à favoriser les hommes plus que les femmes, avait d’ailleurs montré un rapport de l’IRIS publié l’an dernier. Celles reliées à la pandémie n’ont pas fait exception à la règle.

L’équité salariale recule, l’inflation avance

L’écart entre le salaire des femmes et des hommes est en diminution depuis une trentaine d’années au Canada. Toutefois, la pandémie semble avoir inversé cette tendance, selon le rapport.

Plusieurs femmes occupent des emplois plus précaires qu’avant la pandémie, ce qui les place dans une situation où leur salaire augmente moins rapidement que celui des hommes, explique Julia Posca. « Elles occupent des emplois plus précaires, moins bien payés, souvent non syndiqués et où elles n’ont pas vraiment de possibilités de négociation. ».

Pendant ce temps, la montée du coût de la vie frappe principalement les ménages les plus pauvres et les femmes y sont surreprésentées, résume Katherine Scott.

Selon elle, investir dans les nouvelles technologies et les infrastructures sans soutenir les emplois précaires contribue à rendre inéquitable le marché du travail.

« La pandémie pourrait avoir des effets sur la santé économique des femmes pendant longtemps. Il faudra regarder ça de près durant les prochaines années si on ne veut pas perdre les avancées des dernières décennies en matière d’équité au travail », conclut-elle.

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