Nous avons appris que la pesée était une pratique toujours courante dans les cégeps et qu’elle pouvait avoir lieu dans un contexte allant à l’encontre des indications établies par le ministère de l’Éducation datant de 2017. Nous nous questionnons sur la conservation de cette pratique. Il est à noter qu’elle avait été éliminée dans les écoles primaire et secondaire en 2017 car elle était considérée comme étant plus nocive que bénéfique. Nous nous demandons alors : comment cette pratique devient-elle soudainement moins nocive pour une personne lors de son passage du secondaire au cégep?
Les personnes défendant la pratique affirment généralement qu’elle fait partie des outils menant au développement de saines habitudes de vie. Ici il ne s’agit pas de mettre des mots dans la bouche des gens; la ministre de l’Enseignement supérieur Danielle McCann affirmait le 6 octobre dernier à l’Assemblée nationale que « l’ICM (sic) » faisait partie « des saines habitudes de vie ». Mais encore faut-il s’entendre sur la définition « des saines habitudes de vie. » Est-ce qu’elle inclut le fait d’avoir une relation saine avec les aliments qu’on consomme et avec l’activité physique? Et le fait de prendre soin de sa santé psychologique? Si oui, alors la pesée ne constitue pas un outil permettant d’en faire l’évaluation.
Le véritable poids sur la balance
Alors que les projecteurs sont braqués vers « l’utilité » de la pesée pour la santé, les effets néfastes de cette dernière semblent très peu abordés. Pourtant, les impacts négatifs existent bel et bien et peuvent même nuire au développement des fameuses saines habitudes de vie. Le développement de troubles alimentaires après une pesée n’est également pas à négliger. Parce qu’une personne dont l’indice de masse corporelle (IMC) est considéré comme « normal », et qui, parallèlement, suit des régimes restrictifs afin de maintenir ou perdre du poids, verra sa santé physique et psychologique se détériorer. Est-ce un risque que nous voulons prendre alors que les bénéfices de la pesée ne sont pas attestés?
Écouter les expert·es
Même son de cloche du côté dans les milieux de pratique : bien que la mesure du poids soit une pratique assez fréquente dans le système de santé, elle sous-tend plusieurs attitudes et croyances biaisées. Il est question de biais négatifs quant au poids et ses liens (pourtant questionnables) avec la santé, l’éducation, ou la « motivation » à prendre soin de sa santé. Plusieurs personnes en viennent ainsi à craindre, et même à éviter le système de santé. Comme dérive de ces biais, la crainte de serments non consentis, l’embarras, l’exposition (ne pas vouloir être pesé·e) et le matériel non adapté influencent les gens, et ce, peu importe la gravité du problème de santé ou si problème de santé il y a. Une meilleure collaboration, et surtout une communication empathique axée sur les besoins de la personne, seront plus bénéfiques sur sa santé que le poids réel de la pesée.
Ne serait-il pas plus sain de prendre l’habitude de tendre l’oreille aux spécialistes du milieu, entre autres les psychologues et nutritionnistes, qui disent depuis plusieurs années déjà que la pesée ne contribue pas au développement de saines habitudes de vie?
Alexandra Dupuy, Élizabeth Duboc et Vincent Gosselin Boucher
Co-instigatrices et co-instigateur de la pétition Contre la pesée dans les cégeps