
Une minière garde l’argent qu’elle doit à ses ex-employés, deux ans après les avoir mis à pied
L’entreprise s’était engagée à verser les indemnités de fermeture il y a plusieurs mois, mais n’a pas respecté sa parole.
La minière Nyrstar refuse toujours de payer les indemnités de fermeture aux employé·es qu’elle a mis·es à pied à Lebel-sur-Quévillon, il y a plus de deux ans. Les travailleur·euses croient que l’entreprise tente de gagner du temps pour profiter d’un flou dans leur contrat de travail et échapper à ses obligations.
Ce sont 140 ex-employé·es qui attendent après l’argent que leur doit la multinationale belge. En vertu de la convention collective, chacun·e a droit à 750 $ pour chaque année travaillée à la mine, lors de sa fermeture. La plupart ont perdu leur travail à la fin de 2019, quand Nyrstar a mis fin à l’exploitation de la mine de zinc Langlois, après avoir été rachetée par l’entreprise suisse Trafigura, le plus gros négociant en minéraux au monde.
L’été dernier encore, Nyrstar s’était engagée à verser les primes au plus tard en janvier 2022, rapporte en entrevue Sonia Charette, représentante du Syndicat des Métallos dans le Nord-du-Québec. « L’employeur nous avait promis, il avait dit que les sommes d’argent étaient dans un compte à part, en fiducie, qu’on n’avait pas à s’inquiéter, que ça serait payé. » Mais cette promesse, faite verbalement, n’a pas été honorée par la minière, dénonce-t-elle.
Les travailleur·euses s’inquiètent de voir l’entreprise repousser le paiement de son dû, parce qu’en décembre prochain, leur lien d’emploi avec Nyrstar sera définitivement coupé. Au-delà de ce moment, la minière pourrait s’en tirer sans leur verser un sou. « Après cette date-là, les travailleurs ne seront plus protégés par la convention collective », déplore Sonia Charette.
En effet, les ex-employé·es craignent que la minière retarde sa fermeture officielle jusqu’à l’an prochain, une fois qu’elle n’aura plus d’obligation envers eux, afin de conserver l’argent qu’elle leur doit.
« On voit bien que la compagnie attend seulement que [le] lien d’emploi soit rompu pour fermer, en ne payant pas les indemnités de fermeture », affirme Anis Mbaya, président du syndicat local.
Actuellement, explique Sonia Charette, malgré ses promesses passées et même si la mine est inondée depuis plus d’un an, que les activités sont arrêtées et qu’il ne reste plus que « deux, trois employé·es sur les lieux pour l’entretien des bâtiments », Nyrstar prétend que la fermeture définitive n’est pas encore survenue et qu’elle n’a pas à payer ses employé·es mis·es à pied.
« Comme stipulé dans la convention collective, l’indemnité de licenciement sera due en cas de “fermeture permanente et complète des opérations de la mine”. Ce n’est pas la situation actuelle, puisque la mine opère toujours en mode d’entretien et de maintenance. L’échéancier de finalisation n’est pas encore connu », nous a répondu par courriel un porte-parole de Trafigura.
Récemment, le syndicat a demandé à Nyrstar de s’engager par écrit à payer les indemnités aux ex-employé·es et à fixer une date pour ce faire, rapporte Sonia Charette. L’entreprise a refusé.
Au cours des derniers jours, les Métallos ont tenté de communiquer avec l’employeur pour préparer un processus de conciliation avec le gouvernement québécois. Mardi, Sonia Charette était toujours sans réponse. « J’attends toujours depuis vendredi, malgré les messages téléphoniques et les courriels. »
« L’attitude de la Nyrstar est une honte! C’est un mépris envers les travailleurs, envers les Quévillonnais et Quévillonnaises qui leur ont donné les meilleures années de leur vie au fond de cette mine. »
La mine Langlois a cessé ses activités en décembre 2019, peu de temps après que Nyrstar ait été rachetée par Trafigura. Même si le site a toujours un « potentiel géologique », la multinationale suisse juge qu’il n’est plus suffisamment profitable, indique-t-elle par courriel. Le site et ses installations sont à vendre.
Ce ne sont pas les premiers scandales dans lesquels sont prises les deux multinationales. Une fonderie de plomb appartenant à Nyrstar, en Australie, expose depuis de nombreuses années les résident·es à la contamination, sans jamais que l’entreprise ait accepté de leur verser d’indemnisations. Quant à Trafigura, elle est connue pour cacher son argent dans des paradis fiscaux.