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Superman bisexuel : Mathieu Bock-Côté craint la destruction de l’homme blanc hétérosexuel

La révélation de la bisexualité du fils de Superman a suscité de nombreuses réactions haineuses.

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Les commentaires homophobes et biphobes se multiplient depuis l’annonce par DC Comics que le nouveau Superman sera bisexuel. De nombreuses figures publiques au Québec et ailleurs s’indignent de cette représentation, perçue comme une menace pour les valeurs traditionnelles.

L’éditeur DC Comics a officiellement annoncé plus tôt cette semaine que Jon Kent, fils de Clark Kent et nouveau Superman, tomberait amoureux d’un autre homme dans une bande dessinée à paraître en novembre. Le superhéros assumera désormais sa bisexualité.

Aux États-Unis, la sénatrice Wendy Rogers a déclaré sur Twitter qu’elle préférait ne pas voir le nouveau Superman. Elle a proposé de le renommer « Thooperman », un jeu de mots homophobe évoquant le supposé zézaiement attribué aux personnes gaies.

« Laissez nos superhéros tranquilles! » s’est quant à lui lamenté Raymond Arroyo, invité sur la chaîne Fox News. Il a associé la bisexualité de Superman à un risque de « maladies vénériennes ». Il critiquait la « sexualisation » des personnages de bande dessinée, affirmant qu’il était préférable de ne rien savoir de l’orientation sexuelle des superhéros. La plupart de ceux-ci sont pourtant clairement hétérosexuels et s’engagent dans de nombreuses histoires romantiques.

Au Québec

Des commentaires similaires ont circulé au Québec. « C’est quoi ça? » a lancé sur les ondes du 98,5 l’animatrice Nathalie Normandeau. L’ex-vice-première ministre libérale juge que la bisexualité du jeune Superman « secoue nos valeurs et le monde défini par Homme et Femme ».

« Je vais vous livrer le fond de ma pensée : je me suis dit “Oh my god, voilà un autre exemple du politiquement correct!” »

Nathalie Normandeau, animatrice au 98,5

Pour Mathieu Bock-Côté, la bisexualité du superhéros ne constitue rien de moins qu’une « humiliation » pour « notre civilisation ». Dans un récent billet, le chroniqueur au Journal de Montréal affirme « se ficher qu’un super-héros en cape et collants soit hétérosexuel, homosexuel [ou] bisexuel ». Il considère toutefois que le choix éditorial de DC Comics est un geste de  « guerre culturelle » et « d’autodestruction civilisationnelle » visant à faire disparaître « l’homme blanc hétérosexuel ».

« Ils ne veulent pas qu’on existe »

Ces réactions témoignent d’une compréhension « extrêmement rigide » de la masculinité, analyse Judith Lefebvre, libraire chez l’Euguélionne, une librairie montréalaise spécialisée dans la littérature féministe et LGBTQ+. Selon cette vision, « un homme est un homme parce qu’il possède une femme, sinon c’est une moumoune », illustre-t-elle.

« Tout écart par rapport à une norme extrêmement rigide est perçu comme une attaque envers la civilisation. Mais ce qui est humilié, c’est juste l’idée figée de la masculinité [de Mathieu Bock-Côté]. »

Judith Lefebvre, libraire chez l’Euguélionne

Pour Judith Lefebvre, les conservateurs comme Mathieu Bock-Côté souffrent d’une insécurité injustifiée et « comprennent la représentation de la bisexualité comme une menace à l’hétérosexualité ». Pourtant, dans toute l’affaire du nouveau Superman, « il n’y a aucune attaque contre personne, c’est juste de la représentation » de la diversité sexuelle, souligne-t-elle.

Or, c’est précisément la multiplication de ces représentations qui inquiète les commentateurs homophobes, selon Judith Lefebvre. Ils tolèrent la bisexualité, mais ils ne veulent pas la voir, croit-elle.

« Ils ne veulent pas qu’on existe, mais ils ne peuvent pas le dire. Alors ils disent plutôt qu’on ne devrait pas exister publiquement. »

Judith Lefebvre

La libraire rappelle que les représentations de la diversité sexuelle sont essentielles, notamment parce qu’elles permettent aux jeunes qui s’interrogent sur leur sexualité de se reconnaître dans l’espace public et de mieux se comprendre. « La bisexualité en particulier est une identité énormément invisibilisée et marginalisée. C’est donc d’autant plus important d’en parler », conclut-elle.

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